Le département



Le train Scotte


Jusqu’aux dernières années du XIX° siècle, seuls les transports sur rails avaient pu bénéficier des avantages de la traction mécanique.

 

         Cependant, à partir de 1890, la machine motrice va connaître un nouvel essor qui lui permettra de s’adapter aux véhicules routiers.

 

         L’idée de substituer le moteur au cheval dans la multitude des voitures de toutes sortes qui sillonnaient les villes, laissait entrevoir un marché commercial d’une ampleur suffisante pour stimuler  l’ingéniosité des inventeurs. Peu à peu, le perfectionnement des « moteurs à pétrole » et des machines à vapeur permit d’envisager la construction des « omnibus automobiles » pour les voyageurs et des camions automobiles pour les marchandises.

 

         Les journaux du « Petit Troyen » de 1898 permettent de donner toutes les indications qui suivent.

 

         Vers 1896, un certain M. Scotte, d’Epernay, mit au point un train routier à vapeur destiné au transport des voyageurs ou des marchandises. Ce train se composait d’une locomotive routière d’une capacité de 12 voyageurs, et d’une remorque de 24 places comprenant en outre un compartiment à bagages. Le tracteur était muni d’une chaudière verticale système Field et d’une machine de 14 chevaux à 2 cylindres. Le mouvement était transmis par chaînes à l’essieu arrière. La remorque s’attelait au tracteur par son avant train pivotant.

 

         Le train Scotte était monté sur des roues en bois, à rayons, avec bandages en fer. De ce fait, l’engin était assez bruyant parce qu’il circulait sur des routes empierrées en silex. On l’entendait venir de loin et certaines maisons tremblaient à son passage. La vitesse n’était pas très élevée, mais il n’y avait pas d’autres moyens de transport pour se déplacer.

 

         Le train Scotte effectua ses premiers essais dans la proche banlieue parisienne, le 8 avril 1897. Il assura ensuite un service régulier entre le pont de Neuilly (rive droite) et la mairie de Colombes à partir du 22 juin 1897.

 

         Le train Scotte fut présenté dans plusieurs communes de l’Aube en 1898 et parcourut les principales rues de Troyes le samedi 23 juillet, comme l’ont admiré, passant devant leur maison, mon grand père, mon père et ses 5 frères et sœur (mon grand père était chirurgien dentiste, 17 quai des Comtes de Champagne).

 

         A cette occasion, MM. Mony, maire de Troyes, les députés, Conseillers généraux, Conseillers municipaux et toutes les autorités du département furent invités par M. Scotte à prendre place dans le train. Celui-ci emprunta la rue Thiers (Général de Gaulle), puis gagna le boulevard Gambetta, et se rendit, par le quai longeant le canal, sur la place de la Préfecture où il exécuta une série d’évolutions et de virages qui prouvèrent « avec quelle aisance, avec quelle souplesse il pouvait décrire les courbes de petit rayon. Il effectua plusieurs fois des girations donnant aux voyageurs la sensation d’un mouvement de rotation analogue à celui des chevaux de bois ».

 

         Grâce à l’attelage spécial qui avait été adapté à la seconde voiture, celle-ci évoluait autour du même axe que la voiture motrice.

 

         La foule, qui était très nombreuse, suivit ces expériences avec le plus vif intérêt.

 

         Le train Scotte, traversant le pont du canal, s’engagea ensuite dans la rue de la Cité puis dans la rue Kléber et dans le faubourg Saint-Jacques qu’il parcourut à vive allure, après quoi il revint en ville en passant sur la passerelle Saint Aventin (près de l’évêché de l’époque), puis dans une série de petites rues qu’il suivit, sans le moindre à-coup aux tournants, il traversa de nouveau le pont du canal, il se rendit par la rue Claude Huez dans la cour de l’hôtel de ville dont il franchit le porche. Après avoir exécuté une série de nouvelles évolutions, le train repartit par la rue Charbonnet, la rue du Palais de Justice, la rue Jaillant-Deschainets et gagna la place de la Bonneterie (Jean Jaurès), d’où il se dirigea par la rue Notre-Dame (Emile Zola) et le quai du Comte Henri, vers le boulevard du 14 Juillet, puis il remonta  les rues Turenne, du Temple, de la République. Il regagna sa remise par le boulevard Gambetta, le boulevard Carnot, le boulevard Victor Hugo et le faubourg Croncels.

 

         Sur tout le parcours, la foule se pressait et applaudissait.

 

         Par cet itinéraire, le train Scotte fit la démonstration qu’il pouvait évoluer et circuler dans les rues les plus passantes et les plus étroites, grâce à l’ingénieuse disposition des organes de sa machine motrice, il s’avérait aussi maniable qu’une simple voiture de place et cependant, ses 2 voitures attelées contenaient plus de 30 voyageurs. Il faisait figure de précurseurs des autobus articulés qui, 90 ans plus tard, desservent le réseau de transport en commun de l’agglomération troyenne.

 

         Les trains Scotte étaient évidemment appelés à rendre les plus grands services à cette époque en facilitant les rapports entre les communes du département.

 

         C’est au début  du XX° siècle que les communes de la vallée de l’Aube, d’Arcis-sur-Aube à Brienne-le-Château, furent desservies régulièrement par cet ensemble routier.

 

         L’inauguration de la ligne desservant les localités d’Arcis-Coclois-Pougy-Lesmont-Brienne eut lieu en 1903. Ce fut un grand événement.

 

         L’exploitation de la ligne n’étant pas rentable, ce service ne dura que quelques années.

 

         Il fut remplacé par 2 voitures hippomobiles, l’une venant d’Arcis, l’autre venant de Brienne. Elles n’étaient guère utilisées que pour le courrier. Vint ensuite un transport automobile Arcis-Pougy et retour au moyen d’un petit autobus.

 

         Le train Scotte permit au département de l’Aube de pallier au manque de services de transports en commun de voyageurs entre les localités qui ne furent pas reliées par les chemins de fer.

 

         Il préfigura le développement des lignes interurbaines d’autocars qui connurent un essor après la guerre 1914-1918 en se substituant progressivement aux lignes ferroviaires dont l’exploitation fut abandonnée pour des raisons économiques.

 

         Merci à Monsieur Philippe Fourneret, historien de la T.C.A.T., où il a travaillé de nombreuses années et à qui je dois quelques unes des  photos ci-dessous.


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